Le médecin du travail, quand bien même serait salarié de l’entreprise, doit exercer ses fonctions avec la plus grande indépendance.
Et, il convient de rappeler que l’article L. 1110-4 du Code de la santé publique dispose que « toute personne prise en charge par un professionnel, un établissement, un réseau de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations la concernant« .
En l’espèce, un salarié a fait l’objet d’une première visite médicale au cours de laquelle il a été émis un avis d’inaptitude par le médecin du travail. Dès lors, le salarié aurait dû être convoqué pour une seconde visite médicale, en respectant un délai minimal de 15 jours.
Cependant, même si initialement l’employeur a bien sollicité au service de Santé au travail la tenue d’une seconde visite médicale, le médecin du travail avait « estimé qu’il n’y avait pas lieu d’y procéder ».
L’employeur voyant engager sa responsabilité au titre de cette carence, avait produit dans le débat prud’homal une attestation du médecin du travail faisant état d’informations concernant le salarié, et venues à sa connaissance par la consultation de son dossier médical dans le cadre de son activité professionnelle.
Or, le fait pour un médecin, détenteur d’un secret professionnel, de révéler le contenu du dossier médical à un tiers (en l’espèce l’employeur) a fait débat, et la question de la sanction d’un tel comportement a été traitée à la fois par le Conseil de l’Ordre des Médecins (1), mais également par la Chambre sociale de la Cour de cassation (2).
1/. La position laxiste du Conseil régional de l’Ordre des Médecins
Selon le Conseil régional de l’Ordre des Médecins de Lorraine, organe disciplinaire chargé de sanctionner les écarts aux règles déontologiques de ses membres, le Médecin du travail n’avais commis aucune violation du secret médical.
Le Médecin du travail s’est vu infliger un simple blâme, au seul motif qu’il avait manqué à ses obligations en refusant de procéder à un second examen médical comme l’employeur l’y invitait.
C’est ainsi que la Cour d’appel a rejeté la demande du salarié de dommages-intérêts en raison de la faute commise par l’employeur qui avait produit dans le débat prud’homal une attestation du médecin du travail faisant état d’informations le concernant venues à sa connaissance par la consultation de son dossier médical dans le cadre de son activité professionnelle.
2/. La position ferme de la Chambre sociale de la Cour de cassation
Il convient en premier lieu de rappeler que les décisions des juridictions ordinales (en l’espèce le Conseil régional de l’Ordre des Médecins) n’ont pas autorité de la chose jugée devant le juge judiciaire.
Et, la Haute juridiction rappelle dans son attendu de principe particulièrement clair que commet une faute l’employeur qui fait établir et produit en justice une attestation du médecin du travail comportant des éléments tirés du dossier médical du salarié, hormis les informations que le médecin du travail est légalement tenu de communiquer à l’employeur.
Dès lors, selon la Cour de cassation, le fait pour l’employeur d’avoir produit aux débats une attestation du médecin du travail comportant des éléments tirés du dossier médical du salarié violait les règles du secret auquel il est soumis, et prévues à l’article L.110-4 du Code de la santé publique, de sorte que l’employeur causait un préjudice au salarié qui devait être indemnisé.
A retenir : devant les juridictions prud’homales, l’employeur ne peut verser aux débats une attestation du Médecin du travail qui comporterait des informations dont il n’est pas légalement tenu de communiquer.
A défaut, l’employeur s’expose à devoir indemniser le salarié pour avoir fait état d’informations tirées du dossier médical du salarié.
Arrêt : Cass. Soc. 30 juin 2015, n°13-28.201, publié au bulletin