Paiement des salaires : la preuve repose uniquement sur l’employeur

L’article 1315 du Code civil dispose en son second alinéa que : « celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation ».

Si le principe est qu’il appartient au demandeur de prouver les faits qu’il allègue, le défendeur devra quant à lui démontrer qu’il s’est libéré de l’obligation soulevée par le demandeur.

Ainsi, lors d’un procès, un dialogue va se nouer entre les parties, et la charge de la preuve reposera tantôt sur le demandeur, tantôt sur le défendeur.

Cet étrange ballet, s’applique bien évidemment au Droit du travail, dont voici un cas pratique qui a été soumis dernièrement à la Cour de cassation :

Un employeur a rompu, pour faute grave, avant son terme, le contrat de travail à durée déterminée signé avec un salarié. Dans la lettre de rupture, l’employeur s’est engagé à verser au salarié une indemnité compensatrice de congés payés.

La question de Droit qui s’est alors posée aux juges est celle de la charge de la preuve du versement de cette indemnité.

En l’espèce, la Cour d’appel a débouté le salarié de sa demande en paiement d’indemnité de congés payés, au motif qu’il ne démontrait pas la carence de l’employeur.

Le salarié a formé un pourvoi en cassation contre cette décision, et soutenait qu’il ne lui incombait pas de démontrer la carence de l’employeur.

En effet, selon le salarié, il lui appartenait seulement de démontrer qu’il reposait sur l’employeur une obligation de paiement de l’indemnité de congés payés (ce qu’il a fait en versant aux débats la lettre de rupture anticipée de son contrat de travail portant engagement de l’employeur de lui verser cette indemnité), charge ensuite à l’employeur de démontrer qu’il s’est libéré de cette obligation.

La Cour de cassation, au visa de l’article 1315 du Code civil, a fait droit à l’argumentation du salarié.

Cette décision logique rappelle que la preuve du paiement des salaires et accessoires incombe exclusivement à l’employeur.

Arrêt : Cass. soc. 25 juin 2015, n°14-16.635

 

La preuve du respect des temps de pause incombe à l’employeur.

la preuve du respect des temps de pause incombe à l'employeurAux termes des deux premiers alinéas de l’article L. 3171-4 du Code du travail, il est prévu qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Et, au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Il résulte donc de ce texte que la charge de la preuve en matière de durée du travail ne repose sur aucune des parties, et le juge se prononce au vu des éléments versés aux débats par chacune d’entre elles.

Dans une affaire récente, la Haute juridiction a été interrogée sur la question de la charge de la preuve non pas en matière de durée du travail, mais en matière de respect des temps de pause. Lire la suite

la seule réalisation de bénéfices moindres est insuffisante à établir les difficultés économiques.

Preuve difficultés économiquesLe Code du travail vient définir la notion de licenciement pour motif économique en ces termes : « le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d‘une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. « .

Et, en cas de litige sur le licenciement, la charge de la preuve des difficultés économiques incombe à l’employeur.

En l’espèce, par lettre du 4 décembre 2010, une salariée a été licenciée pour motif économique  dans les termes suivants :

(…) au regard des résultats d’exploitation des derniers exercices insuffisants pour assumer pleinement mes engagements financiers et de l’évolution de notre activité en regard de l’environnement actuel assez morose, nous vous avons proposé une réduction significative de votre temps de travail. Vous avez refusé. cette modification. En conséquence, nous ne pouvons maintenir votre poste de vendeuse à temps plein.

La salariée a contesté son licenciement pour motif économique.

Au soutien du motif économique, l’employeur a versé aux débats les bilans et comptes de résultat de la société, faisant apparaître un résultat :

  • de 2008 de 15.159 euros,
  • de 2009 de 18.883 euros,
  • de 2010 de 11.543 euros.

La Cour d’appel n’a pas fait droit aux demandes de l’employeur, et a jugé que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, et a condamné l’employeur au paiement de dommage-intérêts.

La position de la Cour d’appel a été confirmée par la Cour de cassation.

En effet, selon sa jurisprudence constante en la matière, la Haute juridiction a rappelé que le résultat de l’entreprise était fluctuant de 2008 à 2010, mais restait bénéficiaire. Or, la seule réalisation de bénéfices moindres l’année précédant le licenciement est insuffisante à établir les difficultés économiques alléguées par l’employeur.

Dès lors, le licenciement intervenu était sans cause réelle ni sérieuse.

Arrêt : Cass. Soc. 16 avril 2015, n°14-10.551

 

 

prohibition des stratagèmes mis en place par l’employeur afin de contrôler les pratiques des salariés

stratagèmeEn ce qui concerne la preuve des fautes d’un salarié, la Cour de cassation rappelle régulièrement que l’employeur a le pouvoir de contrôler et de surveiller l’activité de son personnel pendant le temps de travail, mais il ne peut mettre en œuvre un dispositif de surveillance clandestin et à ce titre déloyal.

De manière générale, l’employeur ne peut pas recourir à des stratagèmes pour piéger le salarié.

Ainsi, si l’article 9 du Code de procédure civile précise qu’il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention, encore faut il que l’obtention de cette preuve ne soit pas déloyale. Lire la suite

La preuve que le pli ne comportait pas la lettre notifiant le licenciement incombe au salarié

lettre recommandéeAux termes du premier alinéa de l’article L.1232-6 du Code du travail, lorsque l’employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception.

En l’espèce, un salarié a été engagé le 2 octobre 2006 par une association en qualité de médecin directeur.

Le 21 avril 2010, le salarié s’est rendu à un entretien préalable au licenciement.

Il a accusé réception le 15 mai 2010 d’une première lettre envoyée par son employeur, puis a reçu le 31 mai 2010 son solde de tout compte, un certificat de travail et une attestation destinée à l’assurance chômage. Lire la suite