Part variable du salaire = des objectifs réalisables !

Lorsque l’employeur fixe une partie de la rémunération d’un salarié en fonction de la réalisation d’objectifs, il doit s’assurer que ceux-ci sont réalisables.

En l’espèce, une salariée a été engagée le 1er décembre 2009 en qualité d’attachée commerciale et son contrat de travail prévoyait une rémunération fixe d’un montant brut mensuel de 1 400 euros et une rémunération variable assise sur la valeur des contrats d’abonnement facturés. Par un avenant du 8 septembre 2010, la partie fixe a été portée à 1 800 euros par mois et les modalités de calcul de la partie variable ont été modifiées ainsi :

En contrepartie de l’accomplissement de ses fonctions, le salarié percevra une rémunération brute se calculant de la façon suivante :

une rémunération fixe d’un montant brut mensuel de 1. 800 euros.

Une rémunération variable mensuelle brute sous la forme d’un pourcentage sur la valeur HT des contrats d’abonnement au service PASS-PME facturés :
2- a) contrats existants : 2 % de la valeur HT des contrats facturés et encaissés
2- b) nouveaux contrats : un % de la valeur HT des contrats facturés et encaissés, variable en fonction de la réalisation des objectifs mensuels :

Taux de réalisation de l’objectif mensuel de CA facturé, encaissé et comptabilisé % à percevoir sur les contrats facturés et encaissés

à 100 %  –> 6 %
à 90 % et < 100 % –> 5 %
à 80 % et < 90 % –> 4 %
à 70 % et < 80 % –> 3 %

Annuellement, au terme de 12 mois d’activité, si le salarié a réalisé 100 % de son objectif annuel (cumul des objectifs mensuels), on régularise sa rémunération sur la base de 6 % du CA facturé et encaissé sur cette même période.

La rémunération variable concerne les clients gérés par le salarié ainsi que les nouveaux clients qu’il aura prospectés.

Sont considérés comme  » nouveaux contrats « , les contrats signés avec des entreprises ou comités d’entreprises qui ne sont pas clients du service PASS-PME depuis au moins 12 mois.

La rémunération variable est versée au salarié le mois où la société PBW encaisse le montant des factures, exception faite des encaissements perçus 5 derniers jours du mois qui sont reportés au mois suivant.

La salariée a sollicité la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur, en invoquant notamment le caractère irréaliste des objectifs qui lui étaient assignés.

Pour retenir que les objectifs prescrits n’étaient pas réalistes et que le nouveau mode de rémunération avait pour effet de rendre marginale la partie variable de la rémunération, la Cour d’appel a procédé à l’analyse suivante :

Tout d’abord, les objectifs fixés à la salariée par avenant du 8 septembre 2010 lui imposaient d’augmenter le chiffre d’affaires apporté de près de 30 % par rapport à l’année précédente. Or, la Cour constate qu’en fixant le seuil de déclenchement de la rémunération variable à 70 % de l’objectif fixé, la salariée n’aurait pu prétendre à la moindre rémunération variable sur le chiffre d’affaires apporté en octobre 2009, novembre 2009, janvier 2010 et avril 2010.

La Cour retient ainsi que la mise en place du nouvel avenant aurait eu directement pour effet de marginaliser la part variable de la rémunération de la salariée si l’avenant avait trouvé à s’appliquer sur sa rémunération précédente.

Ensuite, entre le mois d’octobre 2010 et avril 2011, à l’exception du mois de février 2011, la salariée n’a jamais été en mesure d’apporter un chiffre d’affaires égal à 70 % de l’objectif convenu.

Dès lors, la remarque retenue par la Cour d’appel précédemment se trouve justifiée, il devenait extrêmement difficile pour la salariée de réaliser les objectifs fixés.

Enfin, la Cour constate que l’employeur ne fournit pas les éléments sur lesquels elle s’est fondée pour déterminer les objectifs fixés à la salariée, et qu’elle ne fournit pas d’informations sur les performances des autres commerciaux, ni sur les objectifs respectifs.

La chambre sociale de la Cour de cassation, procède à la même analyse que la Cour d’appel, en retenant que lors de la signature de l’avenant, l’employeur avait fixé à la salariée des objectifs irréalisables conditionnant le versement de la part variable de sa rémunération devenue ainsi marginale. Ces manquements de l’employeur à son obligation d’exécuter de bonne foi le contrat de travail étaient suffisamment graves pour empêcher la poursuite de ce contrat, de sorte que la résiliation judiciaire du contrat de travail était parfaitement justifiée.

 Arrêt : Cass. soc.  12 février 2016, n°14-27.024

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